Sur le piédestal, sur l'élégante enclume, elle insufflait ses souvenirs et l'essence même de la guerre. Elle imprima dans l'objet son propre vécu de la lutte menée contre Morgoth, et bien involontairement, une part de sa profonde colère s'y glissa. Une colère qui venait avant tout de l'amour qu'elle avait pour ce monde, un monde qu'on avait malmené, meurtri, avili. Cet amour réclamait vengeance, avec une fureur aveugle qu'elle avait parfois du mal à maîtriser.

Et sur le piédestal, sur l'élégante enclume, Ilmarë glissa un message. Elle le dissimula dans le cor, lui donna sa propre voix : souffler dedans suffirait à le libérer.
Une longue note trépidante, qui vous prenait à l'âme, au corps et au cœur. La Maia ne connaissait que bien peu de choses des plans de l'Unique mais elle avait une certitude, venue d'Eru, la seule qu'il avait réellement concédée à ses enfants : un jour viendrait où tous, Valar, Elfes, Nains et Humains, marcheraient côte à côte après la fin des temps. Cette foi, cet espoir inaltérable, elle le confia au cor afin qu'il puisse le claironner sur tous les champs de bataille.