La pente escarpée qui dévalait au pied de la grande forteresse était terrassée par d'innombrables bourrasques frénétiques, glaciales et cruelles. Bien qu'à quelques lieues à peine, au nord, les grandes cheminées d'Angband crachaient de brûlants détritus, les landes de la Marche, elles, faisaient front au froid et à la sécheresse. Les rares animaux qui prenaient refuge dans ce lieu choisissaient plutôt de se terrer dans les entrailles de la montagne jusqu'à la saison hivernale où ils quittaient vers le Thargelion au sud. Rien ni personne ne restait dans la Marche et encore moins sur la Colline tant qu'on avait des pattes pour se déplacer ou des ailes pour fuir cet endroit poisseux.

La patrouille qui se dirigeait vers le pont levis avait intercepté cet homme encapuchonné dont l'allure ne laissait rien présager de bon. En fait, ce n'était pas vraiment sa parure qui avait surpris les cavaliers, mais plutôt le fait que ce dernier était planté là à admirer le paysage...ce que personne ne faisait dans la Marche. En bonne garde frontalière, on l'avait accosté et on lui ordonna de rester où il se trouvait. On posta deux gardes à ses côtés, lesquels il divertit d'une longue conversation. Pas question de le faire pénétrer dans l'enceinte de la forteresse ou de le laisser aller librement ici. C'était un privilège que l'on réservait aux bipèdes portant des bannières connues et à quelques visiteurs de confiance. Ce Sinda étrange, anormalement sympathique, ne répondait à aucun de ces critères, mais avait le profil parfait pour éveiller les soupçons.

La situation se gâta quand le pont levis fut abaissé à quelques kilomètres de la forteresse pour y laisser passer la compagnie de voyage du seigneur Aerakin que Maedhros laissa partir après, on l'avait deviné, ce qui avait dû être un bien chaleureux entretien. Lorsque la compagnie arriva à la hauteur des deux sentinelles et de la mystérieuse figure, cette dernière s'adressa au seigneur de Gondolin et ses hommes.

'' Seigneur Araekin ! Et bien dites-donc ! Il est rare de voir des seigneurs de l'Ouest en ces terres désolées. J'espère que votre entretien avec le seigneur de la Marche a été plus clément que le climat ! ''

Il ricana d'un rire cristallin et brillant.

'' Les Fils de Fëanor n'ont pas bonne réputation, mais je suis certain que vous repartez d'ici avec une meilleure perception... Je l'espère ! ''

Il regarda les deux patrouilleurs. Il y avait un feu dans ses yeux, quelque chose que tous les Elfes possédaient.

'' J'ai encore espoir de, moi aussi, pouvoir démentir les mauvaises rumeur et de rencontrer le seigneur. Peut-être pouvez-vous m'aider avec cette affaire ? ''

Ses habits étaient sombres, mais d'excellente facture. Il les avait soi lui-même fabriqués ou alors il connaissant un fin tisserand. Ses brassards et la cotte qu'il portait étaient d'autant plus précieux, éléments qui détonaient avec la situation actuelle. Bien vêtu ou pas, les patrouille de la Marche n'avait pas l'habitude de laisser aller et venir des experts de la mode.